
Il était une fois un navire - Elsa Pincet
Concours : "Plumier d'or" 2008 - 1e prix
IL ETAIT UNE FOIS UN NAVIRE
Il était une fois un navire. C'était le plus beau navire que la Terre ait jamais porté. Il n'était ni exceptionnellement grand ni formidablement rapide, mais il était superbement proportionné. Sa coque ne mesurait pas plus de cinq ou six mètres de long, en bois foncé. De délicates fenêtres l'ornaient par endroits.
Le pont du navire fourmillait d'activité et restait malgré tout propre, comme par enchantement. Ses voiles étaient brodées de motifs divers ; leur couleur changeait selon le temps qu'il ferait le lendemain. Ainsi, si les voiles étaient couleur d'orage le soir, les marins restaient avec leur famille ou se donnaient rendez-vous à la taverne. Au contraire, si elles prenaient une jolies teinte bleu ou vert pastel, on faisait la fête, car l'on savait que la pêche du lendemain serait bonne.
A l'avant du bateau, la figure de proue représentait un jeune homme aux yeux verts. Il souriait parfois, fronçait les sourcils de temps en temps et rêvait souvent, le menton posé sur ses mains de bois noir. Car la figure de proue, comme le reste du bateau, était vivante...
Personne ne savait d'où venait ce navire miraculeux. Il était apparu un beau matin, après une tempête particulièrement violente, dans la baie de la petite île de Grindeï. Certains disaient que c'était un cadeau des dieux, d'autres ne se demandaient rien et se réjouissaient simplement de sa venue.
Le jour où les Grindewains voulurent sortir le navire de la baie, il se mit à hurler. Le jeune homme de la figure de proue se tenait prostré à l'avant dans une position de douleur. Un cri inhumain s'échappait de sa bouche. Le reste du bâtiment ne tarda pas à joindre ses cris au sien : la coque produisait des sons stridents, le pont sanglotait, les mâts grondaient sourdement, les voiles claquaient...
Les Grindewains abandonnèrent mais il fallut plus d'une semaine de soins intensifs et de paroles apaisantes pour que le bateau se calme tout à fait.
Pendant encore dix ans, il fit profiter les Grindewains de ses bienfaits. Puis, un matin, après une nuit particulièrement paisible, le navire disparut. Il repartit comme il était venu, laissant derrière lui un peuple surpassant tous les autres en matière de prévisions metéorologiques.
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